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Sikkim, Darjiling, impressions de l’Inde himalayenne/4Les monastères lamaïstes. Le monastère Yiga Choeling Ghum à Darjiling.

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La série d’articles sur le Sikkim et Darjiling est composée de huit parties qui se présentent comme suit :

1) Sikkim et Darjiling, l’Inde himalayenne; brève histoire du Sikkim; galerie de photos

2) Brève histoire de Darjiling; galerie de photos

3) Brèves informations sur les religions des origines et le lamaïsme tibétains

4) Les monastères lamaïstes. Le monastère Yiga Choeling Ghum, à Darjiling

5) Monastères sikkimois : Sanghak Choeling et Pemayangtse, à Pelling

6) Monastères sikkimois : Enchey et Ramtek, à Gangtok

7) Monastères sikkimois : Tashiding; Yung Drung Kundrak Ling Bön

8) Lieux sacrés sikkimois : Chörten Do Drul, à Gangtok; Lac Khecheopalri


 Les monastères lamaïstes

Les bouddhistes lamaïstes appellent leurs monastères gompa, littéralement « lieu solitaire ». En effet, les moines ont toujours souhaité vivre dans des lieux retirés du monde, afin de fuir ses tentations et d’améliorer leur méditation. Dès lors, les monastères ont été bâtis dans des sites solitaires ou à quelque distance des lieux habités, ce qui explique le peu d’intérêt manifesté par les moines lamaïstes pour la mendicité.

En conséquence, au Tibet comme au Sikkim et dans les autres pays bouddhistes de l’Himalaya (Ladhak, Népal, Bhoutan), certains monastères ne sont atteignables qu’une partie de l’année et restent coupés du monde en hiver et lors d’inondations; parfois, ils sont accrochés à un rocher ou sont établis ou issus de grottes (notamment ceux de la secte Kagyupa), comme le monastère Taktshang1 au Bhoutan.

Les monastères sont généralement orientés à l’Est et on les a construits, si possible, à proximité de l’eau.

Leurs noms ont une origine religieuse ou reprennent simplement un nom de lieu; au Sikkim/Darjiling, par exemple, Tashiding (« Le gompa du glorieux et élevé rocher blanc »), Enchey (« Eperon en forme de langue »); Dorje Lin/Darjiling (« La pierre précieuse »), Ramtek (nom de lieu lepcha). Avant toute construction ou occupation, le site choisi pour créer un monastère devait être consacré, des rites devaient être accomplis.

Les dimensions des monastères pouvaient être équivalentes à celles d’une cité et accueillir jusqu’à 10’000 moines. Leur architecture s’apparente à celle de l’Inde médiévale.

A l’approche des monastères on aperçoit immanquablement des rangées de drapeaux de prière, de moulins à prière, voire des pavillons contenant un seul grand moulin. On voit également des rangées de monuments funéraires appelés chörten ou chorten  qui abritent des reliques et ont les mêmes fonctions rituelles que les stupa ou chedi chez les bouddhistes non tibétains.

Le chörten tibétain est composé de cinq éléments architecturaux allant de sa base au sommet pointu, qui représente la lumière sacrée du bouddhisme; les autres éléments représentent les éléments : terre, eau, feu, air (la demi-lune horizontale) et éther.

Souvent, on trouve aussi des mendan ou murs de pierres mani, celles-ci portant des inscriptions religieuses, notamment le mantra mystique en six syllabes, « Om mani padme hum«  (Om, le joyau dans le lotus, Hum); ce mantra, on le trouve aussi sur les drapeaux de prière et les moulins à prière. Cette formule, très populaire, est censée, par sa seule énonciation, arrêter le cycle des renaissances et amener celui qui la récite au paradis. Elle s’adresse au bodhisattva Padmapani, réincarnation d’Avalokitesvara, appelé Chenrezig en tibétain.

L’origine de la formule se perd dans la nuit des temps, mais elle est mentionnée pour la première fois au XIIe siècle, par écrit, par Guillaume de Rubrouk2.

Dans chaque monastère on trouve un salle de réunion ou temple, des pavillons pour l’enseignement religieux ou les réunions particulières, les habitations des lamas et des moines.


1 Niché sur des roches à plus de 3000 m, le monastère surplombe la vallée de Paro. Site sacré et ensemble de temples, il a été construit en 1692 autour de la grotte Taktshang Senge Samdup où Padmasambhava aurait médité pendant trois ans, trois mois, trois semaines, trois jours et trois heures, au VIIIème siècle. Comme c’est le cas au Sikkim, Padmasambhava est à l’origine du lamaïsme au Bhoutan, dont il est la divinité tutélaire.

2Guillaume de Rubrouk,(Willem van Rubroek en néerlandais)  originaire de Rubrouk en Flandre française , fut un moine franciscain envoyé en 1253-55, par le roi de France Louis IX, en mission évangélisatrice en Mongolie. Il écrivit un compte-rendu « Voyage dans l’empire des Mongols ».


 


 

Monastère Yiga Choeling Ghum, Darjiling

Le nom de Darjiling provient d’un ancien monastère dit Dorje-lin (« La pierre précieuse ») dont les ruines sont visibles sur la colline de l’observatoire.

Le monastère Yiga Choeling Ghum a été construit en 1850 par le lama mongolien Sokpo Sherab Gyatso et appartient à la secte Gelugpa dite des Bonnets jaunes. Il contient une statue du Bouddha du futur, Maïtreya, ainsi qu’une statue du lama Tsongkapa, fondateur de la secte.

Des peintures typiques des Gelugpa sont visibles sur les murs :

Vajrabhairava ou Yamantaka ou Dorjé-jigs-byed (L’éclair effrayant) est la version courroucée du Bouddha de la sagesse Manjusri; doté de plusieurs têtes, dont la centrale représente un taureau, il possède d’innombrables bras (34) et jambes (16), les uns portant des armes, les autres écrasant les ennemis de la secte (dieux, humains, quadrupèdes et oiseaux). Son épouse Vajravetali, déesse shakti (divinité associée à un dieu plus puissant) représentant l’énergie cosmique primordiale, lui fait face, accrochée à son corps, dans l’union divine de la compassion et de la sagesse. Le style originel de cette composition provient de Lhassa et remonte à la seconde moitié du XVIIe siècle.

Palden Lhamo ou Sri Devi, seule femme parmi les huit dieux protecteurs du bouddhisme (dits dharmapala) est privilégiée par la secte Gelugpa qui la considère comme protectrice du Tibet. Déesse courroucée, elle est représentée montant une mule, assise sur une selle faite avec la peau de son fils. Sa main gauche est revêtue de peaux humaines et tient un demi-crâne en guise de bol, d’où elle se repaît de cervelle et de sang humains. Un collier de têtes humaines entoure la déesse. Le style originel de cette composition remonte à la seconde moitié du XVIIe siècle.

Gyalpo ou esprit d’un roi ou héros à cheval sur un taureau.



 

 

N.B.  Dans les monastères lamaïstes au Sikkim, à de rares exceptions près, il est interdit de photographier à l’intérieur.

Cosimo Nocera est historien et guide du Musée national de Bangkok. Il a vécu et travaillé en Italie, Suisse et en Amérique andine (Pérou, Equateur et Bolivie). Après un long séjour en Asie du Sud-Est, il vit actuellement en Suisse française.

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