Arts | Histoire | Sri Lanka

Sri Lanka, Triangle culturel/3-ALe Triangle culturel du Sri Lanka et quelques autres sites intéressants : aperçu architectural et artistique

par   | 0 commentaire

Cette trilogie présente l’île de Sri Lanka en trois articles, sous trois angles différents :

1) L’île de Sri Lanka dans les textes anciens : mentions, descriptions, récits de voyages

2) Aperçu historique du Sri Lanka, de la Préhistoire à l’Indépendance

3) Le Triangle culturel du Sri Lanka et quelques autres sites intéressants : aperçu architectural et artistique

A eux trois, ces articles donnent une idée du passé de cette île exceptionnelle et peuvent permettre de mieux comprendre son présent.


Le Triangle culturel du Sri Lanka et quelques autres sites intéressants

Aperçu architectural et artistique

Ce qui est appelé le Triangle culturel se situe au Centre de l’île et est formé des sites historiques d’Anuradhapura, Polonnaruwa et Kandy.

Les autres sites visités et décrits sont Ridi Vihara, Sigiriya, Lunuganga, Dambulla, Galle, Kelaniya et Ambalangoda, dans le Centre-Sud.

Anuradhapura, architecture et sculpture

Après l’adoption du bouddhisme theravada comme religion d’Etat, les constructions religieuses abondèrent à Anuradhapura et dans tout le Rajarata (moitié Nord du Sri Lanka, où se développa au Ve siècle une civilisation prospère autour de grands réservoirs d’eau artificiels).

Conséquence de la mission de l’empire indien Maurya (250 av.JC), les premiers modèles artistiques furent indiens; peu à peu, l’indianisation céda la place à un style proprement singhalais. Trait constant de l’architecture, le stupa nord-indien, destiné à abriter des reliques, est le premier objet de vénération, dominant la région de sa masse imposante.

Anuradhapura compte cinq stupa importants : Tuparama, Mirisanati, Ruvanvelisaya, Abhayagiri et Jetavanarama. Les côtés des stupas ont ornés de frontispices appelés vahalkada, d’inspiration Amaravati (style indien), dotés de sculptures contrastant avec les lignes simples des dômes. Peu à peu, ces stupa massifs cédèrent la place à des constructions de moindre taille, p.ex. le Vijayarama. Des terrasses à trois niveaux servent de base à ces constructions.

Autre figure architecturale singhalaise, le vatadage est un sanctuaire circulaire couvert, abritant un petit stupa à l’intérieur. Le plus ancien est le vatadage Thuparama, du IIIe siècle av.JC, pourvu de quatre cercles de piliers en pierre l’entourant; il contiendrait la clavicule droite du Bouddha. La maquette exposée au Musée d’Anuradhapura, montre quel pouvait être l’aspect originel du vatadage.

Anuradhapura est fameuse pour ses sites monastiques, Mahavihara, Abhayagiri et Jetavanarama, qui contribuèrent à diffuser le bouddhisme dans le pays et en Asie du Sud-Est. Jetavanarama fut construit par le roi Mahasena (277-303); ce site abritait 3000 moines et contient les restes d’un stupa, d’une pilimage ou Maison des images, du bodhigara ou Sanctuaire de l’arbre de la Bodhi, la Maisons du Chapitre, la Salle de réunion et le complexe résidentiel. Comme souvent, le site est constitué surtout de restes.

Une simulation en 3D nous permet de revivre les moments de gloire de Jetavanarama. Nous y voyons par exemple la pilimage ou Maison des images, une constructions en voûte contenant une colossale statue du Bouddha en briques et stuc. Il n’en reste aujourd’hui que le piédestal, les montants de la porte et quelques colonnes.

La pierre ne jouait qu’un rôle mineur dans l’architecture singhalaise et était destinée aux structures et ornementations. C’est le bois qui était le matériau de construction principal, mais, contrairement à la pierre, il n’a pas résisté au temps. Aussi, on ne voit plus les belles demeures des rois et nobles, mais on peut toujours admirer les bassins d’eau entourés de murs et pourvus de décorations en pierre.

Une figure décorative typiquement singhalaise est la pierre lunaire, pavé semi-circulaire richement décoré en bas-relief et placé au pied d’escaliers accédant à des sanctuaires ou des résidences importants.

Un autre exemple de la sculpture sur pierre, est constitué par les dvarapala ou gardiens, p.ex. sous la forme d’éléphants ou de nagaraja (roi des serpents) d’inspiration Amaravati.

La statuaire offre la statue la plus ancienne du Bouddha (IIIe siècle avJC) en pierre, en position de samadhi (concentration), mais aussi ses représentations aniconiques sous la forme d’empreintes de pieds. On a découvert dans les monastères d’Anuradhapura des monnaies romaines, indiennes, etc., une statuette en bronze de Shiva hermaphrodite, des céramiques, ornements, bols, bijoux, diverses statuettes en bronze et autres sculptures.

Ridi Vihara, le Temple d’argent

Construit par le roi Dutthugamunu pendant le IIe siècle avJC, sur l’emplacement d’une mine d’argent, ce monastère a été complété pendant le règne de Kirti Sri Rajasinha, roi de Kandy (XVIIIe siècle). Le temple supérieur Uda Vitara a été ajouté à cette époque.

On distingue le Pahala vihara ou Temple inférieur, contenant le sanctuaire d’un Bouddha assis et du roi Dutthugamunu, qui présente des influences indiennes; le Maha Vitara, ou Temple principal, avec des statues de Bouddhas et d’un Bodhisattva (être ayant atteint l’état d’éveil mais ayant suspendu l’entrée dans le nirvana par compassion pour les êtres humains) debout, ainsi que des peintures; enfin, le Uda Vitara, ou Temple supérieur; avec une statue du Bouddha assis, en bois, ainsi qu’une pierre lunaire.

 

Dambulla, temples troglodytiques

La ville de Dambulla est construite autour d’un rocher de granit qui comporte un nombre important de grottes. Un édifice religieux dit Temple du Rocher doré est placé sur un ancien site préhistorique et s’ouvre sur un ensemble de cinq grottes-temples remontant au IIIe siècle avJC, restaurées et décorées aux XII, XVI et XVIIIes siècles. La plus importante est la grotte n° 2, dite Maharaja vihara, longue de 52 et large de 23 m. Deux autres grottes contiennent également des statues du Bouddha, de rois et de bodhisattva, des peintures murales et même un stupa.

Cet ensemble de grottes a été créé par le roi d’Anuradhapura Vattagamani Abhaya, réfugié à Dambulla en 104 avJC après la perte de son trône.

Sigiriya, la roche fortifiée

Sigiriya, qui était un monastère au Ier et 2e siècle avJC, rappelle l’histoire du roi usurpateur Kassapa (477-495) qui, ayant tué son père, contraignit son frère et successeur désigné Moggallana à l’exil en Inde. Craignant sa vengeance, au Ve siècle apJC il abandonna la capitale Anuradhapura pour s’en créer une nouvelle sur un rocher escarpé, à 80 km au SE d’Anuradhapura. Le rocher de Sigiriya est haut de 370 m et est situé à proximité d’une retenue d’eau.

Au sommet, Kassapa fit construire une forteresse, avec palais et piscine, la partie entourant le rocher étant aménagée, au Sud et à l’Est, en jardins d’eau et de pierre, et en terrasses. Deux murailles et fossés assuraient la sécurité de l’ensemble. Kassapa fit aussi creuser un tunnel souterrain pour amener l’eau à la forteresse et agrémenter les jardins (fontaines, étangs et arrosage).

La montée au rocher a lieu en plusieurs étapes : après avoir franchi les murs on pénètre dans un beau jardin d’eau, suivi d’un jardin de pierre et d’un jardin en terrasses. Par une longue allée on arrive au pied du rocher, où une porte en forme de lion gigantesque attend le visiteur; du lion, il ne reste que les pattes. Un escalier en fer assez raide mène enfin au sommet du rocher, d’où la vue embrasse les montagnes du Centre et les collines du Nord.

Sur la paroi sud du rocher des artistes inconnus ont peint des portraits féminins connus sous le nom de « Demoiselles de Sigiriya » et représentant soit des apsara (créatures célestes), soit les concubines du roi. Le style est celui des grottes indiennes d’Ajanta, alors centre bouddhiste et d’études. Sur le mur de protection qui longe les peintures on peut observer des inscriptions (remarques, critiques, appréciations, etc.) faites par d’anciens visiteurs des peintures.

Le roi Kassapa, crédité par ailleurs de l’introduction du manguier sur l’ensemble de l’île de Sri Lanka, fut vaincu par son frère Moggallana, revenu avec une armée de mercenaires dravidiens; Moggallana redonna à Anuradhapura son statut de capitale.

 

Les Demoiselles de Sigiriya

 

Kandy, le Temple de la Dent

Edifié aux XVII et XVIIIs siècle par les rois de Kandy, ce temple (Dalada Maligawa), situé au bord d’un lac, dans le complexe du palais royal de Kandy, renferme la plus précieuse relique du pays : une dent du Buddha. Cette dent provenant de l’incinération du Bouddha, aurait été apportée au Sri Lanka au IVe s. av.JC. Elle devint un symbole de souveraineté, donnant à son possesseur le droit de régner sur l’île. Cette relique fait l’objet d’une procession (Perahera) annuelle.

 

Lunuganga, jardin d’architecte

Il faut avoir passé une journée dans ce jardin d’architecte pour en saisir l’atmosphère, envoutante. Mélange réussi d’éléments indigènes et de l’antiquité classique, exubérance de la végétation tropicale, un air de mélancolie qui incite au rêve, une surprise à chaque pas.

Ce grand jardin, se trouvant près de la petite ville de Bentota, à une soixantaine de km au Sud de Colombo, est un sanctuaire pour la faune et la végétation.

Il a été créé par Geoffrey Bawa (1909-2003), l’un des plus remarquables et visionnaires architectes sri-lankais. Grand voyageur, sensible à l’histoire dont il a une vision aux facettes multiples, Bawa a su faire revivre la sensibilité indigène et la référence aux modèles de l’antiquité classique dans le paysage luxuriant de cette ancienne plantation, qu’il a su transformer en un lieu quasi mystique.

Géré depuis 1982 par une association au nom de son fondateur, ce jardin accueille les visiteurs en leur proposant des logements, tout en leur servant une succulente nourriture de production locale, basée sur la savoureuse cuisine sri-lankaise.

Cosimo Nocera est historien et guide du Musée national de Bangkok. Il a vécu et travaillé en Italie, Suisse et en Amérique andine (Pérou, Equateur et Bolivie). Après un long séjour en Asie du Sud-Est, il vit actuellement en Suisse française.

    Laisser un commentaire

    Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *