Arts | Pérou

Sarhua et sa tradition picturaleArtisanat traditionnel péruvien

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Sarhua et ses activités artistiques

Sarhua est un village du Centre-Sud péruvien, situé dans les montagnes du département d’Ayacucho, à une altitude de 2982 m.

Cette communauté paysanne vit largement en autarcie, principalement d’agriculture et d’élevage.

Mais Sarhua pratique aussi l’artisanat. Les artisans ne sont pas des professionnels, mais s’occupent principalement de leurs champs et troupeaux.

L’activité artisanale la plus connue de Sarhua est la peinture sur bois. Celle-ci s’exprime dans des peintures sur deux types de supports, les tablas (poutres) et les planchas (planches).

La coutume veut que lors de la construction de leur maison, les parrains et marraines, ainsi que d’autres parents et connaissances, offrent aux nouveaux mariés leur aide, ainsi qu’une qellqa (poutre) en bois, décorée avec des motifs allusifs au couple et aux familles. Ces poutres peintes (tablas), dont les motifs se réfèrent aux croyances religieuses traditionnelles des Andes et aux systèmes de parenté, réciprocité et cohésion sociale, sont ensuite fixées dans la poutraison du toit de la maison à deux pentes. D’autres tablas peuvent s’ajouter par la suite : plus une maison possède de tablas, plus elle est socialement représentative.

Les tablas mesurent généralement 2,5 m de haut et 30 cm de large.

Leurs peintures doivent être lues de bas en haut et leur décoration suit un schéma immuable : tout en bas figurent une dédicace des parrains et les signatures d’autres donateurs, la date de production de la tabla; puis vient une image de la Vierge de l’Assomption, patronne de Sarhua, suivie des images des membres de la famille et de leur travail, de l’image des parents du couple et de leurs proches, des engagements sociaux du couple. Enfin apparaissent les apus (montagnes), les condors, les trois harawiq (poétesses), le butiqaqipiq (porteur de cruche), le soleil (inti), la lune (killa) et une ou plusieurs étoiles (quyllurcha) en tant que symboles des divinités andines.

A la fin de la construction a lieu la fête dite tabla apaykuy où les familles et la communauté mangent, boivent et dansent autour de la maison au son de la musique.

La poutre connue la plus ancienne date de 1876. La tradition est toujours vivante, même si ces dernières années elle a pris un tournant commercial destiné à un public plus large. De symboles de réciprocité les tablas sont également devenues des objets décoratifs.

Il existe des familles spécialisées dans la peinture des tablas, mais aussi de tableaux dont les motifs peuvent être religieux, moraux, sociaux, mythiques, historiques, politiques.

A partir de 1957, certains comuneros (membres de la communauté villageoise) de Sarhua sont partis pour Lima à la recherche de meilleures perspectives ; ils se sont installés dans les pueblos jovenes (bidonvilles) qui entourent la capitale, tout en y reproduisant les caractéristiques architecturales et sociales de leur village d’origine.

Parmi ces migrants se trouvaient Primitivo Evanan Poma, Victor Yucra et Julian Ramos, les peintres les plus connus à cette époque.

A partir de 1972, une fois établis dans leur nouvelle résidence, motivés par une épidémie qui s’était déclarée au village, ils ont commencé à peindre sur des planchas (planches en bois), en format généralement rectangulaire, les paysages, la vie quotidienne, les fêtes, traditions et mythes de leur village d’origine, munis de textes explicatifs. La vente de ces oeuvres leur fournissait une aide financière destinée à affronter les dépenses occasionnées par l’épidémie.

En 1975 ils ont inauguré leur première exposition dans la Galerie Huamanqaqa de Lima.

En 1982 ils ont fondé l’association ADAPS (Asociacion de artistas populares de Sarhua). 

Au début des années 80 une nouvelle réalité a fait son apparition dans les peintures sur planchas de Sarhua.

Fondé en 1970, le mouvement Sendero Luminoso, d’inspiration communiste, a déclaré à partir de 1980 la guerre à l’État péruvien.  Né à l’Université d’Ayacucho, Sendero Luminoso s’était rapidement diffusé, surtout dans la montagne andine. Les populations de ces régions, notamment à la campagne, se retrouvèrent placées entre le marteau (les rebelles) et l’enclume (les forces de l’ordre péruviennes). Les premiers apparurent dans les villages pour y faire du prosélytisme et se faire ravitailler, les secondes pour y exercer une violente répression.

Face à cette nouvelle situation les migrants installés à Lima commencèrent à peindre des scènes relatives au conflit armé; entre 1990 et 1992 ils systématisèrent ce conflit en une série de vingt quatre planchas appelée piraq causa kaykunapaq (qui est le coupable?), décrivant la guerre civile telle que l’avaient vécue les habitants de Sarhua.

Selon Primitivo Evanán, la réalisation de cette série était due à « la nécessité de représenter la violence que la communauté a connue » (chakwa), entre 1980 et 1982, aussi bien de la part des rebelles que de la part des autorités.

Paradoxalement, ce sont ces peintures qui valurent aux peintres de Sarhua une renommée dépassant le cadre local.

En effet, en 2017, bien après la fin des hostilités, les autorités péruviennes saisirent une série de peintures de Sarhua envoyées des Etats-Unis au Pérou, dans le cadre d’un don au Musée d’Art de Lima. Une enquête fut ouverte contre les peintres, accusés d’apologie du terrorisme. Cependant, en devenant un scandale dont les media s’emparèrent, l’enquête se retourna contre les autorités.

Il est vrai que les peintures représentaient des scènes où apparaissaient les guérilleros de Sentier lumineux au sein du village de Sarhua, avec leurs drapeaux à l’enseigne de la faucille et du marteau.

Mais Primitivo dit que ces images “sont des photographies de l’époque, dans laquelle les rebelles avaient occupé une grande partie de la région d’Ayacucho, l’une des plus touchées au niveau national.”

Pour sa part, le Musée d’Art de Lima expliqua que “ces pièces sont des œuvres d’art et ne constituent pas des excuses pour le terrorisme : elles reflètent des événements réels vécus par les communautés d’Ayacucho. La série Piraq Causa contient des images qui racontent la souffrance du peuple de Sarhua, enregistrent le rejet de l’idéologie du Sentier Lumineux et condamnent le terrorisme”.

Primitivo vit dans cet événement une opportunité de faire connaître à un vaste public la réalité des problèmes que la lutte armée causa à sa communauté villageoise. En 2019, avec l’anthropologue et historien Ramón Mujica, il écrivit une compilation de mémoires picturaux sur les effets du conflit armé à Sarhua.

En 2018, cela valut à la peinture de Sarhua la consécration officielle d’ « Héritage Culturel » et à Primitivo Evanan Poma la distinction de “Personnalité Méritoire de la Culture”. 

Outre la peinture, les autres activités artisanales du village consistent en la confection de lliqllas (textiles d’épaule utilisés par les femmes pour le transport d’enfants ou de marchandises), muruy punchus (ponchos), chumpi (ceintures), varas (bâtons ou sceptres sculptés symbolisant l’autorité des autorités traditionnelles appelées varayoqs), qillqay wali (jupes multicolores tissées).

Les lliqllas

Ci-après figurent quatre exemples de lliqllas de Sarhua ayant 70 à 80 ans d’âge :

 

Contacts personnels débouchant sur des créations peintes

A fin 1980, début 1990 l’auteur de ces lignes était au Pérou avec la Coopération technique suisse. Sachant qu’il était intéressé par la culture péruvienne, une connaissance le rendit attentif aux peintres de Sarhua. Il se rendit à Chorrillos, où les peintres s’étaient établis, et fit la connaissance de Primitivo Evanan Poma et de sa famille. Un bon contact s’établit qui déboucha sur un dialogue suivi concernant le vécu des peintres, ainsi que sur le visionnement de leurs œuvres. 

Une commande leur fut passée pour une série de planches peintes ayant pour thème la culture de Sarhua. Elles constituent une petite collection qui comprend des planchas à thèmes religieux, mythiques, politiques et sociaux (voir ci-dessous).

Plus tard, la discussion porta sur les tablas traditionnelles ; on décida qu’une tabla serait peinte pour le soussigné (voir ci-après).

L’auteur de ces lignes parla des peintres de Sarhua à son ami Peter Gaupp, correspondant de la Neue Zürcher Zeitung à Lima, qui fit également la connaissance de Primitivo Evanan Poma et de sa famille. Il leur commanda la série de 24 peintures dénommées piraq causa kaykunapaq (qui est le coupable?), à caractère politique, qui par la suite fit l’objet d’expositions aux Etats-Unis et au Costa-Rica et finit par causer la crise de 2017 (voir ci-haut).

La petite collection de planchas peintes de Sarhua et leurs textes explicatifs

Les textes explicatifs écrits par les peintres sur les planchas sont rédigés en castillan, mais l’absence de ponctuation, la syntaxe et, parfois, le choix des termes découlent du quechua.

Planchas sur la religion andine

Note : Dans la religion andine un apu est une montagne, mais aussi une divinité. L’apusuyo est le lieu où se tiennent les divinités. Le culte rendu aux apu consiste en offrandes de nourriture pour se concilier leur bienveillance.  

Apusuyos 

(Texte)

Despues de herranza de vacunos ovinos envian mesa puesta multiples offrendas al supremo huamani consistentes en frutas vinos pan especial coca quinto cigarillos llampus flores etc apusuyo predilecto (4) sucia millqa punchauniyoc comidaràn a los apusuyos (1) pukakunka (2) apu urqo (3) raswillka (5) qarwaraso (6) chillkaraso deleitaràn exquisitas oblacion acordando proteger y hacer multiplicar los ganados encomendados

Après le marquage des moutons ils présentent une table avec plusieurs offrandes au dieu suprême consistant en fruits vins pain spécial coca cigarettes sacs en laine d’alpaca fleurs etc au dieu préféré (4) sucia millqa punchauniyoc (sites archéologiques près de Sarhua) nourriront les divinités (1) pukakunka (2) apu urqo (3) raswillka  (5) qarwaraso (6) chillkaraso les régaleront d’exquises offrandes en convenant de protéger et faire multiplier le bétail confié

 

Oku Pacha (1993)

Note : dans la religion andine, l’Oku Pacha représente le monde inférieur, les entrailles de la nature. On peut l’assimiler à l’Enfer chrétien.

(Texte)

Todos los muertos van al Oku Pacha (infierno) donde seràn quemados por el fuego candente seràn castigados severamente por diablos por todos sus malo actos malintencionados unos quantos se salvaràn y se iràn a Anaq Pacha (cielo) el resto seguiràn purgando

Tous les morts vont en Oku Pacha (enfer) où ils seront brûlés par le feu incandescent ils seront sévèrement châtiés par les diables pour toutes leurs mauvaises actions malveillantes quelques uns seront sauvés et iront en Anaq Pacha (ciel) les autres continueront à purger

 

Anaq Pacha (1993)

Note : l’Anaq Pacha est le monde d’en-haut, lieu où se tiennent Inti, le Dieu Soleil et sa sœur Mama Qilla, Déesse de la Lune. C’est le lieu où aboutissent ceux qui ont mené une bonne vie.

(Texte)

Es el mundo celestial donde està Dios omnipotente rodeados de angeles alli van las almas despues de salvarse de los sufrimiento en Oku Pacha quedaràn para siempre almas qui tuvo buen comportamiento en Kay Pacha los demàs almas seràn rechazados y bagaràn en la tierra como almas y condenado

C’est le monde céleste où se trouve Dieu tout puissant entouré d’anges c’est là où vont les âmes après s’être échappées des souffrances en Oku Pacha y resteront pour toujours les âmes qui se sont bien comportées en Kay Pacha les autres seront repoussées et descendront sur la terre comme âmes et damnés errants

 

La creacion del hombre (1993)

(Texte)

Dios creo al universo en una semana – para que habitara la tierra decidio crear al hombre y los animales domesticos a su servicio de invidia supay diablo emitaba y creo al chipe mono animales silvestres 

Lo creo Dios                                                             Lo creo supay diablo

1  hombre                                                                  1 chipe

2 caballo                                                                     2 vicuña

3 cabra                                                                        3 luwicho     

4 paloma                                                                     4 coculi 

5 loro                                                                           5 akakllo 

6 chancho                                                                    6 añas 

7 gallina                                                                       7 yuto 

8 gato                                                                           8 puma

9 pavo                                                                          9 condor

10 conejo                                                                     10 viscacha

11 perro                                                                       11 atoq 

12 cuy                                                                          12 ocucha 

13 vaca                                                                         13 toruca 

14 burro                                                                       14 puron asno

15 pato                                                                         15 wuachua 

Dieu créa l’univers en une semaine – il décida de créer l’homme afin qu’il habite la terre ainsi que les animaux domestiques à son service par jalousie supay diable l’imita et créa chipe le singe et les animaux sauvages

Crées par Dieu                                                  Créés par supay diable

1   l’homme                                                        1   le singe

2.  le cheval                                                        2   la vigogne

3   la chèvre                                                        3   le luwicho (chevreuil)

4   la colombe                                                     4   le coculi (colombe)

5   le perroquet                                                    5   l’akakllo (pic)

6   le cochon                                                        6   l’añas (putois)

7   la poule                                                           7   le yuto (perdrix)

8   le chat                                                              8   le puma

9   la dinde                                                            9   le condor

10 le lapin                                                             10  la viscacha (marmotte andine)

11 le chien                                                              11   l’atoq (renard)

12 le cobaye                                                            12  l’ocucha (souris)

13 la vache                                                              13 la toruca (cerf)

14 l’âne                                                                   14 le puron (âne)

15 le canard                                                             15 la wuachua (oiseau des marais)

 

Kay Pacha (1993)

Note : c’est le monde intermédiaire, le monde réel où vit et agit l’homme, où il naît et meurt.

(Texte)

En el reino del presente mundo Kay Pacha existe pobreza y riqueza – abigeos – vicio – sos alcoholicos – mentirosos – ociosos – asesinos todos viven libremente sabiendo que cuando mueren sus almas iràn al Okupacha – donde seràn castigados lue(go) se salvaràn iràn al Anaq Pacha

Au règne du monde présent Kay Pacha existent la pauvreté et la richesse – les voleurs de bétail – le vice – l’alcoolisme – le mensonge – la paresse – les assassins tous vivent librement en sachant que lorsqu’ils mourront leurs âmes iront en Okupacha – où ils seront châtiés puis ils seront sauvés et iront en Anaq Pacha

 

Plancha sur les mythes andins

Qarqacha 

Note : dans la mythologie andine, le qarqacha est un être monstrueux noir, mi-homme mi-animal, qui a enfreint un tabou social et apparaît vers une heure du matin pour effrayer, voire tuer les passants. On le représente généralement comme un lama à visage humain ; les peintres ont choisi de le représenter comme une sorte d’âme errante enchaînée.

(Texte)

3 jovenes predientes a una bella doncella – apostaron hacer bailar alma y condenado – quien cumpliera la apuesta se casaria con la doncella – 2 se fugaron de miedo 1 fue devorado por el qarqacha encadenado

3 jeunes gens prétendant à une belle jeune fille parièrent qu’ils feraient dancer une âme damnée – celui qui gagnerait le pari se marierait avec la jeune fille – 2 prirent la fuite 1 fut dévoré par le qarqacha enchaîné

 

Plancha sur les croyances magiques andines

Pongo 

Note : au sens littéral, pongo veut dire «personne servant un maître» ; dans le cas présent il faut l’entendre comme «personne en relation avec l’au-delà», guérisseur, chamane.

(Texte)

Para sanar a un enfermo incurable el ampiq pongo que tiene poder magico extrahumana – recurre a los poderes del supremo apusuyos quienes bajo oracion ritual a horas 1 A.M. apareceràn en forma de condor – descubre su mal e indica el tratamiento y la medicina

Pour guérir un malade inguérissable l’ampiq pongo qui possède un pouvoir magique extra humain – recourt aux pouvoirs des divinités suprêmes qui après une prière rituelle à 1 heure du matin apparaîtront sous forme de condors – découvriront le mal et indiqueront le traitement et la médecine

 

Planchas sur la violence politique 1980-90

Sinchis (1991)

Note : sinchi est un vocable quechua qui signifie «courageux» ; dans le contexte péruvien il s’agit d’une troupe paramilitaire de la police péruvienne spécialisée dans les opérations de contre-insurrection. Au même titre que les militaires, pendant la guerre civile les sinchis se sont signalés par leurs violentes actions de répression dans les communautés indigènes. Les sinchis intervinrent à Sarhua suite à une dénonciation de la part d’un comunero concernant la supposée présence de terroristes dans le village. Des villageois furent enlevés et emprisonnés, mais furent ensuite jugés et libérés de toute charge.

(Texte)

30 setiembre 81 . 2 PM . entre granizados truenos vientos semi huracanes destruyeron a la comunidad 13 exaltados sinchis armados valeandose recluto a inocentes campesinos(as) creo terror fin del mundo

30 septembre 81 . 2 heures de l’après-midi . entre grêle tonnerre vents proches de l’ouragan 13 sinchis exaltés en tirant parti de leurs armes ont arrêté d’innocents paysan(ne)s en créant une terreur de fin de monde

 

Onqoy (1991)

Note : au sens littéral, onqoy veut dire «maladie» ; dans le cas présent, il faut l’entendre comme «situation anormale», dérangement. Il s’agit de l’arrivée dans le village d’un groupe de propagandistes du mouvement de guérilla Sentier Lumineux.

(Texte)

Portando metralletas cuchillos petardos explosivos y bandera roja con vestidos distintos llegaron intrusos elementos extraños a la comunidad sacando casa en casa a los comuneros a un cabildo obligado con amenazas de muerte se les escuché sus falsas promesas de justicia social – campesinos netamente de habla quechua no comprenden discursos

Munis de mitrailleuses couteaux bombes explosifs et un drapeau rouge vêtus de différentes tenues arrivèrent des intrus éléments étrangers à la communauté faisant sortir les comuneros (membres de la communauté) de leurs maisons pour participer à une assemblée forcée avec des menaces de mort on écouta leurs fausses promesses de justice sociale – les paysans clairement de langue quechua ne comprennent pas leurs discours

 

Maldecidos (1991)

Note : en réponse aux incursions de Sendero Luminoso l’armée péruvienne effectua à son tour des incursions dans les villages, s’en prenant aux comuneros accusés d’avoir accueilli les guérilleros, les frappant et les enlevant pour être emprisonnés en ville.

(Texte)

En diferentes comunidades y caminos a la ciudad los maldecidos militares aprehenden a golpes patadas a los hinocentes indefensos campesinos en busca a los malhechores intrusos mal de rabias terroristas – los apresados sedientes y ambrientos simimuertos son conducidos a la ciudad para ser juzgados por elementos que no conocen la vida tradicional de origen incaica

Dans diverses communautés et routes vers la ville les maudits militaires arrêtent en les frappant et distribuant des coups de pied les innocents paysans sans défense à la recherche des malfaiteurs intrus enragés terroristes – les arrêtés assoiffés et affamés à moitié morts sont conduits à la ville pour être jugés par des personnes qui ne connaissent pas leur vie traditionnelle d’origine incaïque

 

Plancha à caractère politique

Falsa promesa 

Note : cette peinture montre l’arrivée dans la communauté d’un groupe de propagandistes politiques venus recueillir les adhésions des paysans en vue d’élections. Les expériences passées ont appris aux comuneros à ne pas prêter foi aux promesses, jamais tenues, des propagandistes.

(Texte)

La comunidad es netamente de habla quechua con su ideologia propia – heredadas de tiempos inmemoriales en momentos de elecciones generales llegan los politicos con las diversas promesas de progreso jamàs cumplieron – los ayllus sauja y quillana no entiende ni creen consideran en enfermos de cabeza que andan pueblo en pueblo

La communauté est clairement de langue quechua avec sa propre idéologie – héritée de temps immémoriaux lors d’élections générales arrivent les politiciens avec leurs diverses promesses de progrès jamais tenues – les ayllu sakwa et qollana (les deux communautés de familles formant le village de Sarhua) ne comprennent ni croient ils les considèrent des malades mentaux qui vont de village en village

 

Plancha à caractère moral

Tentacion (1991)

Note : ce tableau reflète un aspect du code moral andin qui rejette l’adultère ; autre face obligée de cette situation, la pipelette cachée qui observe le comportement des deux mariés adultères ira répandre son ragot dans tout le village.

(Texte)

Por la tentacion de los diablos una pareja de casados tratan conciliarse en el campo solitario – angeles buenos protectores lloran al ver tal hecho repugnante los diablos bailan de alegria al ver una chismosa que comunicarà a familiares quienes protestaràn

Tenté par les diables un couple de personnes mariées cherche à se concilier dans la campagne solitaire – les anges gardiens pleurent en voyant ces actes répugnants les diables dansent d’allégresse en apercevant une commère qui informera les proches lesquels protesteront

 

Plancha en hommage à la Coopération technique suisse

Cooperacion tecnica suizo (1992)

Note : cette plancha a été créée par les artistes de Sarhua en hommage la coopération technique suisse, à Lima. On y voit apparaître toute l’équipe de l’époque, sur fond de collines sablonneuses qui entourent la capitale ; on aperçoit aussi le pueblo joven (bidonville) où vivent les peintres.

 

La tabla ayant pour thèmes les projets de la Coopération technique suisse au Pérou

 

La tabla de Sarhua

Lorsqu’il fut décidé qu’une tabla serait peinte pour l’auteur de cet article, on constata qu’il manquait l’élément essentiel, à savoir sa famille. En discutant avec Primitivo et les autres peintres il fut alors convenu de remplacer la famille par ce qui constituait l’environnement de travail du commanditaire, à savoir les projets de la Coopération technique (COTESU), ainsi que les responsables de projets et coopérants. C’est ainsi que fut créée la tabla décrite ci-après, dûment fêtée, en 1992, après son achèvement en 1991, par une tabla apaykuy .

La tabla mesure 2.30 de haut et 24 cm de large.

Selon la tradition, elle se lit de bas en haut.

Tout en bas figurent la dédicace de la tabla et sa date de finition.

(Texte)

Recuerdo

Con todo cariño dedicamos al Señor Cosimo Nocera como recuerdo inolvidable pour su sincera amistad brindada a los integrantes de ADAPS, 14.6.91

Artes de Sarhua «ADAPS» Peru 91

Souvenir

Avec toute notre affection nous dédions (cette planche) à Monsieur Cosimo Nocera comme un souvenir inoubliable pour son amitié sincère offerte aux membres d’ADAPS, 14.6.91

Artes de Sarhua «ADAPS» Pérou 91

 

Puis suivent les projets de la Coordination technique suisse.

Entre les projets, les artistes ont peint une décoration florale.

1. Projet «Programa de emergencia» (Programme d’émergence)

Ce programme fut créé pour subvenir aux besoins vitaux des communautés paysannes ; il consistait dans le versement de subsides, en nature ou en argent, contre des travaux d’utilité publique (construction de routes, creusement de canaux d’irrigation, etc.)

Y figurent le commanditaire, ainsi que sa collaboratrice Susann Marti.

2. Projet «Escuela, ecologia y comunidad campesina» (Ecole, écologie et communauté paysanne)

Il s’agissait d’un programme destiné aux écoles primaires de villages, en vue de sensibiliser les enfants, et par là leurs parents, à la connaissance, au respect et à l’entretien de l’environnement. Ce programme était largement diffusé dans les départements de Cajamarca et Cusco.

Y figurent la chef de projet Antonieta Noli, les coopérants Etienne Durt et Anne Volet.

 

3. Projet «Papas – SEINPA» (Pommes de terre – SEINPA)

En collaboration avec le Centre international de la pomme de terre, à Lima, ce projet soutenait la conservation des variétés traditionnelles, la recherche et le développement de ce tubercule d’origine andine.

Y figurent le coordinateur Peter Bischof et le consultant Efrain Franco.

4. Qellqay wasi (Maison des peintres)

Ici les artistes de Sarhua établis à Lima se présentent dans leur atelier en train de travailler.

Y figurent Primitivo Evanan Poma, Juan Quispe, Julian Ramos et Valeriana Vivanco.

5. Herrandina

Herrandina était un projet créé en collaboration avec des forgerons de villages pour la production d’un outil agraire polyvalent en métal, à traction animale, adapté à la largeur réduite des andenes (champs en terrasses).

Comme souvent, ce projet comportait aussi des effets collatéraux, par exemple la création, dans les villages dépourvus de cafés-restaurants, d’un lieu de rencontre dans les forges lors de travaux d’entretien de l’outil.

Y figurent le chef de projet Raul Hermoza et le consultant Jürg Wieland.

6. Arbolandino

Ce projet avait pour but la reforestation des Andes avec des espèce indigènes pour combattre la déforestation héritée de la colonisation. Il comportait des cours de sensibilisation, des pépinières, des conseillers itinérants.

Y figurent le chef de projet Charles Carton, le consultant Luis Flores.

7. FCR – Tejas (FCR – Tuiles)

La production de tuiles avec des matériaux locaux (roseaux, ciment, etc.) à l’aide de petites machines simples à vibration était le but de ce projet. Les tuiles, séchées à l’air, remplaçaient avantageusement les toits en tôle ondulée.

Y figure le chef de projet Cesar Dominguez.

 

Tout en haut figurent les symboles traditionnels des tablas :

les trois poétesses (harawiq) et le porteur de cruche (butiqaqipiq), les montagnes (apucha), le soleil (inti), une étoile (quyllur) et la lune (killa).

 

Cosimo Nocera est historien et guide du Musée national de Bangkok. Il a vécu et travaillé en Italie, Suisse et en Amérique andine (Pérou, Equateur et Bolivie). Après un long séjour en Asie du Sud-Est, il vit actuellement en Suisse française.

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